Mondialisation : les travailleurs de l’industrie sont-il vraiment plus vulnérables ?

S’il est admis que le commerce international accroît la richesse totale des États, la question de savoir qui et combien sont les travailleurs « perdants » de la mondialisation n’est pas scientifiquement close. Une manière d’y répondre est de comparer les parcours des salariés licenciés pour motif économique, selon qu’ils proviennent d’un secteur directement exposé à la concurrence internationale (l’industrie manufacturière ainsi que plusieurs secteurs des services) ou au contraire d’un secteur qui en est abrité. C’est le propos de la Note de La Fabrique « Parcours de travailleurs dans une économie mondialisée ».

Moins de licenciements économiques dans le secteur exposé à la mondialisation

Même si la plupart des économistes affirment, résultats à l’appui, que la mondialisation est un processus globalement gagnant, les Français gardent une mauvaise image de cette dernière, en particulier de son impact sur l’emploi. Leur inquiétude est particulièrement forte concernant les métiers industriels, du fait de la médiatisation intense des fermetures d’usines. En réalité, l’ouverture aux échanges joue peu sur le volume d’emplois à long terme. Surtout, cette étude montre que le risque de licenciement économique est moins élevé pour un salarié de l’industrie (2,3 %) que pour ceux qui travaillent dans les services abrités de la mondialisation (3,3 %).

Un retour à l’emploi plus difficile pour les anciens salariés de l’industrie

S’ils perdent moins souvent leur emploi, les salariés licenciés de l’industrie ont cependant davantage de difficultés à retrouver un emploi que ceux du secteur abrité. La concentration géographique des activités manufacturières rend plus difficile et coûteux de retrouver un emploi dans la même activité, en raison de la distance séparant les sites de production. Les travailleurs licenciés de l’industrie sont donc souvent amenés à changer de secteur d’activité pour retrouver un emploi, et 40 % d’entre eux retrouvent un emploi dans les services abrités, qui sont en moyenne moins qualifiés et plus précaires. En outre, les compétences exigées dans certains métiers industriels (soudeurs, chaudronniers, etc.) sont spécifiques et donc peu transférables, ce qui aggrave les pertes salariales dans ces nouveaux emplois : le manque à gagner en cas de changement de secteur s’élève à 35 %, contre 26 % pour ceux qui travaillaient dans un secteur abrité.

Quelles politiques pour accompagner le retour à l’emploi ?

Ces résultats alimentent le débat sur les aides à la mobilité professionnelle et à la reconversion. Il y aurait un sens à compenser les travailleurs victimes d’un « choc commercial » ou à aider davantage les territoires fragilisés par la mondialisation. Surtout, l’étude insiste sur le rôle de la formation professionnelle pour améliorer l’employabilité des travailleurs des secteurs exposés : les travailleurs ont besoin de développer des compétences transversales pour s’adapter aux mutations de postes ou de secteurs. Une définition normalisée des compétences transversales permettrait une meilleure orientation des travailleurs vers les postes auxquels ils peuvent prétendre, et un renforcement de leur formation professionnelle continue aiderait à limiter les pertes salariales en cas de reconversion.

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