La folie des robots collaboratifs
Beaucoup prévoient l’arrivée de robots ultra-intelligents dans l’industrie. Mais les entreprises considèrent également la voie exactement opposée : des machines très simples, peu chères et aptes à collaborer avec les hommes.
Il y a encore trois ans, on n’en comptait que deux fabricants sur le marché. Désormais il y a plus d’une quinzaine de constructeurs à en proposer dont – divine surprise ! – plusieurs français. Entre-temps, ils ont trouvé un nom de baptême : les « robots collaboratifs » ou, mieux encore, les « cobots ». Ils sont le nouvel eldorado de la robotique.
Rapide rappel. Un robot collaboratif c’est un robot industriel à bas prix – souvent moins de 30 k€ – et aux performances limitées, tant en précision et en vitesse que pour l’importance des masses soulevées – en général moins de 10 kg. En revanche, il est très facile à programmer et à installer. C’est surtout un robot qui, pour toutes ces raisons, peut travailler sans risque avec ou à proximité immédiate d’un opérateur, d’où le terme « collaboratif ». Les robots traditionnels, très rapides et lourds, sont trop dangereux pour cela, on doit les enfermer dans des cages !
Ces caractéristiques ouvrent un vaste champ d’application à la robotique. Celui des PME, d’abord, freinées jusque-là dans leurs projets d’équipement par le coût et, surtout, la complexité d’installation. Mais toutes les entreprises, même les plus grandes, tirent déjà parti des cobots. Ils ne concurrenceront jamais les robots traditionnels pour toutes les tâches exigeant vitesse et précision. En revanche, ils se prêtent à une multitude d’activités : assemblage, mise en caisse, chargement-déchargement de machines, manutention légère, etc. En cela, ils constituent un peu l’équivalent de ce qu’a été le microordinateur dans le monde de l’informatique.
Le domaine évolue à grande vitesse. Les cobots actuels permettent aujourd’hui essentiellement le « partage d’espace » : les travailleurs et les robots travaillent côte à côte mais chacun est affecté à sa propre tâche. Arrive désormais une idée plus avancée du travail collaboratif : le « partage de tâche ». Cette fois, hommes et robots s’entraident pour effectuer un travail en commun. Le robot peut par exemple présenter une pièce à un opérateur qui effectuera un contrôle de perçage ou une autre opération. Ici, une start-up française, Sybot, joue les pionniers avec un cobot issu des travaux du CEA List.
Ce mode de collaboration, où chacun, homme et robot, apporte son savoir-faire et ses meilleures compétences – la répétabilité inlassable pour le robot, l’intelligence pour l’homme – est forte d’un immense potentiel. Il semble en effet beaucoup subtil, et plus facile à réaliser, de jouer la complémentarité homme-robot que de vouloir mettre au point des robots hyper intelligents capables de remplacer purement et simplement les hommes de métiers…
Les deux premiers constructeurs à avoir défiché le terrain des cobots sont d’abord le suédois Universal Robot puis l’américain Rethink Robotics. Désormais, non seulement d’autres start-up ont rejoint leurs rangs mais, surtout, les constructeurs de robots industriels – très réticents au début – s’y mettent allègrement. C’est déjà le cas d’ABB, Fanuc et Kuka notamment.
Côté français, outre Sybot, d’autres constructeurs apparaissent. Sarrazin Technologies a développé un cobot capable de manipuler des charges lourdes ; Percipio Robotics propose un cobot de micro-assemblage compact ; MC Robotics ou encore MIP Robotics offrent également des cobots à bas prix, ce dernier battant tous les records avec une machine à moins de 8 000 euros ! A noter également, l’entreprise RB3D, exerçant de longue date sur une cobotique spécifique : l’assistance au geste. Elle s’appuie non pas sur des robots au sens traditionnel mais sur des manipulateurs évolués, voire des exosquelettes, qui procurent à l’homme une réelle assistance à l’effort.
Franck Barnu