De la naissance à la croissance : comment développer nos PME
L’institut Montaigne publie onze recommandations pour faciliter la croissance des PME qui créent, en France, « davantage de richesses que les grandes entreprises ».
Le contenu du rapport
Sur les 2,8 millions d’emplois créés en France ces 20 dernières années, 2,3 millions l’ont été par des PME. C’est l’un des principaux arguments pour les considérer comme « le moteur de la croissance économique et de l’emploi dans notre pays ». A ceci s’ajoute le raisonnement, bien connu maintenant, selon lequel les ETI jouent un rôle essentiel dans la capacité industrielle à exporter, à innover et à investir. Or, les ETI étant notoirement peu nombreuses en France par rapport à celles que l’on trouve en Allemagne ou au Royaume-Uni, il devient doublement nécessaire de permettre aux PME de prospérer et de croître.
L’analyse publiée par l’institut Montaigne est commise par un groupe de travail, sur la base de l’expertise de ses membres (ce sont souvent des patrons de PME) et d’auditions.
Les onze recommandations mises en avant sont :
- Développer la mise en place d’aides publiques pour les entreprises technologiques avec un système de matching privé-public et inverser la logique qui prévaut actuellement où la subvention publique vient d’abord.
- Utiliser le levier fiscal pour financer nos PME et nos ETI et renforcer les dispositifs actifs au soutien de l’investissement dans le cadre d’une réforme globale de la fiscalité.
- Obtenir des grandes entreprises opérant en France de réduire leurs délais de paiement […] afin d’être, dans trois ans, dans la moyenne européenne.
- Inciter les grands groupes à avoir leur propre fonds d’investissement […] dans des statups ou des PME.
- Développer la pratique du rescrit fiscal pour le CIR.
- Rendre obligatoire le stage en PME ou en ETI pour les élèves des grandes écoles, y compris l’ENA.
- Développer la culture de l’entreprise et de l’entrepreneuriat dès le lycée.
- Améliorer les conditions d’accueil pour les entrepreneurs étrangers.
- Faire des approches pluri- et transdisciplinaires une priorité au sein des cursus universitaires.
- Créer une entité de « prospection scientifique et technologique » afin de valoriser les résultats des laboratoires de recherche fondamentale.
- Développer les filières « innovation et entrepreneuriat » au sein des cursus universitaires.
Le point de vue de La Fabrique
Ce rappport s’attaque à un défi industriel français, colossal et dont le diagnostic est relativement partagé maintenant. Il fait le choix de balayer, sérieusement quoique parfois succinctement, l’ensemble des « faits établis » sur le sujet.
Le lecteur novice y trouve une synthèse à jour, accessible et efficace, sur les freins financiers, administratifs et culturels qui s’opposent à la croissance des PME en France. Le lecteur averti en retire quant à lui quelques éléments orginaux, utiles à la réflexion : par exemple, le fait que les entrepreneurs français recherchent comme une sécurité à être propriétaires de leurs locaux, alors que, ce faisant, ils se privent de marges de manœuvre pour investir dans leur activité (leurs homologues étrangers sont beaucoup plus fréquemment locataires).
Les onze recommandations ne cherchent pas à être toutes commensurables. Elles peuvent avoir des effets espérés à deux ans comme à vingt, des effets lourds comme des effets légers. En outre, il se confirme à la lecture que le rapport traite à la fois des start-ups, des PME et des ETI, qui sont des publics très différents. L’ambition du rapport est donc vaste, d’autant plus vaste que certaines des recommandations s’adressent moins à l’Etat qu’à des parties prenantes plus insaisissables, telles les universités ou les entreprises.
Parvenu à la fin du rapport, l’appétit aiguisé par cette mise à jour fluide et bien construite, on reste toutefois avec une question et un regret. La question naît des leçons que l’on peut tirer des cas allemand et britannique. En effet, l’Allemagne étant surtout citée pour ses résultats économiques et le Royaume-Uni principalement mis en avant pour la générosité de sa politique fiscale, on ne comprend pas toujours comment les pratiques de l’un peuvent conduire à la performance de l’autre.
Le regret vient de ce que l’Etat est sommé à la fois de réduire son déficit et d’alléger certaines recettes (les charges qui pèsent sur les PME, la fiscalité des investisseurs et l’ISF) mais qu’il faudrait se reporter à une autre publication du même institut Montaigne (Christian Saint-Etienne, Quelle réforme fiscale pour la France?) pour comprendre comment cette équation réputée ardue peut être résolue.