L’intégration verticale, voie de performance pour les PMI ?
Deux exemples récents montrent que l’intégration verticale peut représenter un atout pour des petites entreprises.
Il est étonnant de voir des PMI opter pour l’intégration verticale, qui plus est avec succès, alors que les grands groupes n’ont eu de cesse de se dé-verticaliser depuis des années. En voici deux exemples, chacun avec ses justifications.
Commençons par Gys. L’entreprise, de 540 personnes et de 60 M€ de chiffre d’affaires en 2013, est devenue l’un des tous premiers acteurs mondiaux des postes de soudures et chargeurs de batteries depuis son rachat par Nicolas Bouygues (frère de Martin). Chez Gys l’intégration est quasi-totale. L’entreprise de Laval réalise quasiment tout en interne : la tôlerie, la découpe, la peinture des produits finaux, l’usinage… Elle réalise ses propres cartes électroniques, ses propres transformateurs et même la production de ses fils de cuivre !
Quelle est la motivation de Gys ? L’innovation, répond Bruno Bouygues, directeur général et fils du propriétaire. « Nous avons choisi de tout faire par nous-mêmes parce que c’est la meilleure façon d’innover ; notre maîtrise totale de la technologie et des process nous permet de développer des produits uniques et de haute qualité. L’innovation est en effet principalement liée aux process : elle est la somme d’améliorations pointues à chaque étape de la production et sur chacun des composants du produit final. Ne pas dépendre de sous-traitants pour nos sous-ensembles nous assure ainsi de disposer de produits spécifiques, correspondant parfaitement nos ambitions et auxquels, qui plus est, nos concurrents n’ont pas accès. Ce savoir-faire sur les produits semi-ouvrés nous procure également une très grande flexibilité et une formidable réactivité. »
Autre grosse PMI, même volonté d’intégration. Le groupe Rexxia, organisé en grappe d’entreprises, est un sous-traitant de rang un de l’aéronautique, secteur qui représente 66 % de son activité, installé à Issoire (63). Il produit des sous-ensembles composites et hybrides composites-métal pour des clients comme Dassault Aviation ou Airbus Hélicoptères. Il est également équipementier, concevant et fabricant… des avions écoles tout en carbone ! Le groupe affiche un chiffre d’affaires de 63 M€ et compte 660 collaborateurs répartis sur 8 sites.
Là encore, la sous-traitance est réduite à son strict minimum. « Nous sous-traitons moins de 6 % de notre production alors que, généralement dans notre profession, ce chiffre se situe aux environs de 35 % » dit Jacques Moniot, fils du fondateur et directeur général du groupe. Du bureau d’étude jusqu’au montage final et au contrôle 3D, en passant par la peinture des pièces et le traitement de surface, tout se fait en interne.
Si on retrouve chez Rexxia des motivations semblables à celles de Gys, la raison majeure de cette politique d’intégration est différente. C’est avant tout une question de réactivité : les donneurs d’ordres de l’aéronautique mettent en effet une formidable pression sur leurs sous-traitants en termes de délais de livraison. Pour Jacques Moniot, l’intégration est le seul moyen de garantir ces délais. « Nous sommes une entreprise de petite taille. Si l’un de nos sous-traitants reçoit une importante commande d’un grand donneur d’ordres, celui-ci risque d’être privilégié au détriment de notre commande, qui ne sera plus prioritaire. Nous ne pouvons pas prendre ce risque. Nous avons donc choisi l’indépendance. Même si cela peut conduire à un léger surcoût, cette solution est préférable à la perte d’une commande… En outre, cela nous donne une très grande réactivité, par exemple pour répondre à un appel d’offres. C’est crucial. »
On notera que ces entreprises ont un autre point commun : ce sont toutes deux des entreprises familiales. Pour Bruno Bouygues, en matière d’investissement à long terme, c’est un point essentiel. Concrètement, chez Gys, c’est en moyenne 5 % du chiffre d’affaires qui se trouve investi en R&D chaque année et 6 à 7 % dans l’outil de production. Le centre de R&D flambant neuf qui vient d’ouvrir à Laval, employant près de 50 chercheurs, en témoigne.