Territoire d’industrie Aurillac-Figeac-Rodez : une leçon de coopération et de combativité
Pourquoi certains territoires sont-ils plus dynamiques que d’autres sur le plan industriel ? Quelles conditions locales permettent le maintien, voire la croissance, des emplois industriels dans certains territoires ? Voici les questions auxquelles cherche à répondre l’observatoire des Territoires d’industrie, piloté par La Fabrique de l’industrie.
Cette fois, l’étude signée Bastien Bezzon se concentre sur un territoire qui se distingue par sa ruralité et son enclavement géographique : Aurillac-Figeac-Rodez, qui s’étend sur trois départements r (Lot, Aveyron et Cantal) et deux régions, l’Occitanie et Auvergne-Rhône-Alpes. En dépit de ces deux caractéristiques, a priori peu compatibles avec un développement industriel, ce territoire abrite de nombreux sous-traitants des secteurs de l’aéronautique, de la machine-outil, de l’automobile ou encore de la Défense. Retour sur un exemple éloquent de territoire, dont la performance est le résultat d’une combativité et d’une coopération réussie entre acteurs locaux.
Quand la menace façonne l’avenir : les racines industrielles de la Mecanic Vallée
Une structure industrielle naît nécessairement de choix stratégiques. Dans le cas de ce territoire, la spécialisation du territoire en mécanique de précision est un choix d’intérêt national . Nous sommes dans les années 1930, et face au péril allemand, la France décide de délocaliser ses industries stratégiques. L’axe Figeac-Rodez devient alors un bastion de l’aéronautique, avec l’installation de Ratier Figeac, fabricant d’hélices devenu équipementier de premier rang pour Airbus, Boeing, ATR, Dassault ou encore Bombardier. Cette dynamique s’est ensuite renforcée dans les années 1980 avec l’essaimage industriel initié par Ratier Figeac, qui a permis de donner naissance à des entreprises comme Figeac Aéro, Fem Technologies et bien d’autres PME. Ces dernières, tout en diversifiant leurs marchés, ont su maîtriser par ailleurs des niches techniques pour réduire leur dépendance aux donneurs d’ordre.
La menace, c’est aussi celle de la désindustrialisation quand l’exploitation des mines de Decazeville cesse en 1965. En 15 ans, le bassin perd alors 21 % de ses emplois. Le territoire peut cependant compter sur l’émergence de son activité métallurgique, qui s’organise dans les années 1960 autour de l’attraction de grands groupes : le producteur d’aluminium Pechiney, à Laval-sur-Cère dans le nord du Lot et l’équipementier automobile allemand Bosch, à Onet-le-Château (proche de Rodez).
Coopérer pour durer
Ce qui fait la dynamique positive de l’axe Figeac-Rodez, c’est la nature des relations entre donneurs d’ordres et sous-traitants, entre dirigeants locaux ou encore entre industriels et acteurs publics, et leur manière de faire système. Par exemple,aux enjeux de recrutements et de compétences, la ville de Figeac et les industriels répondent par un solide partenariat public-privé qui donne naissance à l’IUT Figeac dans les années 1990. Les entreprises organisées autour des métiers de la mécanique procèdent également à des prêts de main-d’œuvre pendant les périodes de forte turbulence économique. Par ailleurs, les relations interpersonnelles entre les industriels locaux leur permettent d’échanger sur leurs problématiques partagées et d’y apporter des solutions. Ces relations sont orchestrées par la Mecanic Vallée, véritable intermédiaire territorial qui anime la dynamique collective autour des acteurs de la mécanique. Cette dynamique favorise la pérennisation des savoir-faire spécifiques locaux et l’ancrage des entreprises au territoire, en leur permettant de dépasser ensemble les problèmes posés par la géographie du territoire (faible accessibilité, foncier peu disponible, etc.).
De la mécanique au bois : l’industrie en quête d’un tronc commun
Prochaine étape de développement de cette région : intensifier les synergies entre Aurillac et Figeac-Rodez. Dans cet objectif,la création d’une filière bois pour valoriser les ressources et les savoir-faire liés au bois, largement présents dans le territoire, est en réflexion.Inspirée de la Mecanic Vallée, cette « vallée du bois » ne se fera pas en un jour. Elle suppose la construction d’un système d’acteurs, l’implication d’entrepreneurs territoriaux ou politiques ainsi que des acteurs publics. Or, les acteurs du bois sont isolés, de leurs propres dires. Le défi est donc immense.
Julie Celeste Meunier
Chargée des relations presse
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