Compétitivité et emploi relèvent d’un pacte national pour l’industrie

Non à une logique de compétitivité défensive qui ne reposerait que sur l’effort des salariés

Une prise de conscience s’est produite chez les acteurs politiques, économiques et sociaux, quant à la nécessité d’une réindustrialisation de la France, condition de son redressement économique et de l’emploi, qui passe par un regain de compétitivité industrielle socialement acceptable. Cette prise de conscience progresse aussi dans l’opinion publique. La compétitivité et l’emploi ne peuvent être des objets d’échange à grande échelle, dans une logique de compétitivité défensive qui ne reposerait que sur l’effort des salariés et une baisse du coût du travail.

Un tel mouvement ne répondrait pas aux enjeux cruciaux que sont l’emploi et la compétitivité. Il produirait un appauvrissement des salaires et de la demande. Il aurait aussi des effets négatifs pour l’industrie, en détériorant son image et son attractivité, en générant des conflits sociaux. Mais surtout, ce serait une nouvelle erreur stratégique d’orientation de l’industrie sur une éphémère compétitivité-coût, sur une productivité encore une fois gagnée sur les hommes et les femmes, la détournant encore une fois des autres facteurs de compétitivité offensive et durable : innovation, qualité, respect des délais…

Certaines centrales syndicales n’ignorent pas pour autant la question du coût du travail, la mienne par exemple, qui a fait des propositions de rééquilibrage de la fiscalité et du financement de la protection sociale, en transférant une partie des charges sociales sur la CSG.

Retrouver de la compétitivité est indispensable pour beaucoup d’activités exportatrices, principalement industrielles. Mais cela doit s’inscrire dans un pacte national et social de réindustrialisation, qui donne un sens à la compétitivité. Un pacte à négocier, qui impliquerait aussi l’Etat, avec une politique industrielle axée sur la montée en gamme et la croissance verte de la production française.

Alors pourrait s’envisager sa déclinaison en faveur de la compétitivité et de l’emploi, par des négociations d’entreprise encadrées par un accord national. Nous savons d’expérience que de telles négociations exigent beaucoup de conditions de transparence, de loyauté, de proximité, de maîtrise et de contrôle des engagements, ainsi qu’une visibilité totale sur l’objet et les impacts d’un accord. Toute modification substantielle du contrat de travail ne devrait être valide qu’avec la signature de syndicats représentant plus de 50 % des voix aux élections. Les salariés n’étant pas égaux devant les conséquences d’un changement de leur statut, ils devraient conserver la possibilité individuelle de le refuser.

La négociation compétitivité-emploi en cours ne doit en aucun cas se porter sur la dérèglementation sociale, mais être assortie d’un ensemble de mesures cohérentes en faveur de la réindustrialisation et de la compétitivité, dans le prolongement de la déclaration commune MEDEF, CGPME, UPA/ CFDT, CFE-CGC, CFTC. Ce qui demande du temps.

Il est par ailleurs important de corriger la comparaison avec l’Allemagne. Les conventions collectives y sont l’essentiel des règles du travail, dans des branches de ce fait en situation de régulation macroéconomique. C’est là que la modération salariale s’est négociée, que les dérogations aux conventions collectives sont permises, à des entreprises ciblées par accord, selon des circonstances établies et pour des durées limitées. Les syndicats y sont puissants et le système de codétermination leur donne une vision exacte de la situation et de la stratégie de l’entreprise. En France, c’est en ce sens que la loi devrait évoluer, pour améliorer l’information-consultation et son lien avec la négociation.

Dominique Gillier

Ancien ouvrier de maintenance dans la sidérurgie, il est Secrétaire Général de la Fédération Générale des Mines et de la Métallurgie CFDT (FGMM CFDT), membre du Bureau National...

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